Numérique pour l’éducation et les solidarités

Pourquoi mener une politique d’équipement individuel mobile ?

Les Assises 2022 ont consacré leur deuxième table ronde au numérique pour l’éducation, en questionnant la pertinence d’une politique d’équipement individuel mobile pour les scolaires. Qu’en disent les neurosciences, les enseignants et les politiques ? Un dialogue orchestré par le journaliste Emmanuel Davidenkoff.

 EIM : retour d’expérience gagnant à Triel-sur-Seine

À l’image du Département des Yvelines, certaines collectivités se lancent actuellement dans des projets d’EIM (Equipement Individuel Mobile) de grande ampleur à destination des élèves et du corps enseignant. Sur ce sujet, les Assises ont bénéficié du retour d’expérience d’un collège de 750 élèves où cette formule est testée depuis maintenant six ans : Les Châtelaines à Triel-sur-Seine. « Comme toujours avec les outils numériques, il y a des réticences au démarrage mais une fois qu’on y a goûté, difficile de revenir en arrière ! Grâce aux EIM, les enseignants placent leurs élèves en situation de reprendre leurs apprentissages en main » a expliqué le principal de l’établissement, Jean-Pierre Nugue. Côté technique, celui-ci a souligné la nécessité d’avoir un matériel et un accompagnement de qualité, saluant l’intervention de Seine-et-Yvelines Numérique sur ce point. Autre facteur clé de réussite : la sensibilisation et la formation des enseignants, un défi notamment relevé à Triel-sur-Seine par la mise en place d’un groupe de pilotage animé par des professeurs convaincus de l’utilité de la démarche. La communication doit également être adressée aux parents d’élèves, pour dissiper leurs éventuelles inquiétudes et expliquer la solution. Enfin, la valorisation des travaux et projets menés par les élèves grâce à ces nouveaux outils constitue une brique importante du dispositif : blogs, webradios ou concours, elle peut prendre de nombreuses formes et contribue à ancrer la démarche.

 

Tablettes : des bénéfices certains en termes d’apprentissage

Ces constats étant faits, la table-ronde a pris un peu de recul en cherchant à savoir ce que nous disent les neurosciences sur le sujet. Pour de nombreux chercheurs, les EIM ont des effets positifs car ils permettent de s’adapter à la manière dont le cerveau apprend, en faisant à l’enfant des retours rapides sur ce qu’il est en train de produire. Les premières études menées constateraient à ce titre des progrès significatifs dans l’apprentissage de l’écriture. Certains outils numériques comme les jeux vidéo peuvent même avoir des effets positifs sur le développement du système attentionnel. L’Education nationale surveille de près ces recherches et mène ses propres études quant à l’effet des EIM, à l’image d’ELAINE (Evaluation longitudinale des activités liées au numérique éducatif), qui a suivi, durant plusieurs années, un échantillon d’établissements afin d’évaluer les résultats du plan numérique 2015. Pour résumer, l’impact des EIM est scientifiquement mesurable et permet d’obtenir de meilleurs résultats sur la compréhension orale du français ou encore sur les mathématiques, notamment pour les élèves les plus défavorisés. « Ce que viennent battre en brèche nos études, c’est la notion de digital natives, ces générations supposées être naturellement à l’aise avec l’outil numérique. Il existe de véritables disparités entre les jeunes concernés, et de nombreuses inégalités que l’équipement des scolaires en EIM peut aider à combattre » a déclaré Philippe Wuillamier, Direction de l’évaluation, de la prospective et de la performance (DEPP), Education nationale.

Les collectivités territoriales à la manœuvre

Pour Grégoire Borst, Chercheur en Neuroscience, « il faut aujourd’hui changer de perspective et passer de l’éducation par le numérique à l’éducation au numérique. Comment ? En armant les nouvelles générations avec des compétences numériques, mais aussi et surtout en associant parents, enseignants et élèves autour de cette question, dans une optique de co-éducation ». Conscientes qu’il s’agit là d’un sujet d’intérêt public pour leurs administrés, les collectivités s’emparent actuellement de ce sujet. « La question n’est plus de savoir s’il faut ou non équiper les élèves en EIM, mais de s’interroger sur la manière dont on procède et dont on accompagne la démarche auprès des publics concernés. Il est de notre responsabilité politique de réduire la fracture numérique et de favoriser la réussite pour chaque élève » a estimé lors de la table ronde Cécile Dumoulin, Vice-présidente déléguée aux collèges et au numérique scolaire, Département des Yvelines – Conseillère départementale du canton de Limay. C’est pourquoi, dès 2015, le Département des Yvelines a lancé, en concertation avec l’Education nationale, une expérimentation dans la lignée du plan numérique national, dotant 17 collèges d’un cartable numérique. Le retour très positif des établissements concernés, couplé avec les résultats de l’étude ELAINE, ont conduit le conseil départemental à généraliser le dispositif à l’ensemble des collèges yvelinois le désirant, qu’ils soient publics ou privés. Le Département, premier partenaire des communes, a également décidé d’aider les municipalités à équiper les classes de CM1 et CM2, dans une optique de continuité pédagogique. ■

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